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très longtemps, les mêmes malades, à travers les incidents de leur longue existence, et nous pouvons résumer ici les résultats auxquels nous sommes arrivé, par suite de cette observation prolongée d’un assez grand nombre de cas de folie circulaire.

Grande uniformité des accès. La maladie n’aboutit pas à la démence. — Le premier de ces résultats peut se formuler ainsi : Cette forme de maladie mentale présente, dans l’ensemble de sa marche, depuis son début jusqu’à la mort, une grande uniformité dans la succession et dans les caractères de ses différentes périodes. Vingt ans ou trente ans après, on retrouve ces aliénés à peu près semblables à eux-mêmes, soit dans la période d’excitation, soit dans le stade mélancolique, soit dans l’intervalle lucide. Sans doute ils subissent, comme tous les hommes, les effets naturels du progrès de l’âge, qui diminue, dans une certaine mesure, l’activité de toutes les fonctions physiques et intellectuelles. Comme tous les aliénés passés à l’état chronique, ils peuvent éprouver, après un grand nombre d’années, un certain degré d’affaiblissement intellectuel, si on les compare à eux-mêmes, à de très grandes distances ; mais, chose remarquable, les aliénés affectés de folie circulaire, de même que la plupart des malades atteints de la folie héréditaire, baissent beaucoup moins intellectuellement et même physiquement que la plupart des hommes et surtout que les autres aliénés arrivés à l’état chronique. On voit dans tous les asiles quelques malades atteints de cette forme d’affection mentale, parvenus à l’âge de 60 ou 70 ans, ayant conservé, malgré cet âge avancé et malgré l’ancienneté de la maladie, une activité intellectuelle presque juvénile, bien propre à étonner tous ceux qui en sont témoins, surtout pendant la période d’excitation, quand elle se maintient à un degré moyen d’intensité. On est donc autorisé à poser en principe, comme axiome digne d’intérêt, que la folie circulaire peut se prolonger pendant toute la vie des individus qui en sont atteints, sans qu’ils arrivent jamais jusqu’à la démence et même sans affaiblissement intellectuel bien prononcé.

Les accès se raccourcissent avec l’âge et l’intervalle lucide tend à disparaître. — Un second fait important que nous avons également constaté chez plusieurs individus atteints de folie circulaire à longues périodes est le suivant : En général, à mesure que les malades avancent en âge et que leur affection devient plus ancienne,