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À cette question nous répondrons, d’après notre observation personnelle et d’après l’ensemble des faits publiés en France et à l’étranger. Sans doute, on observe des cas exceptionnels dans lesquels les deux états de mélancolie et d’excitation se succèdent indéfiniment sans aucun intervalle lucide (faits qui mériteraient plus particulièrement le nom de folie à formes alternes) ; il en est quelques autres également, dans lesquels on a cru pouvoir établir cliniquement l’existence de deux phases de raison placées entre chacune des périodes morbides ; mais dans la grande majorité des cas, il n’y a qu’un seul intervalle lucide vrai, d’une durée plus ou moins longue, et il se produit le plus souvent après la période mélancolique.

Pour la description clinique de la maladie, et surtout au point de vue de la médecine légale, il importe d’entrer dans quelques détails sur les caractères qui permettent de distinguer le faux intervalle lucide du véritable intermède de raison.

Supposons un malade dans la période d’excitation de la folie circulaire. Après avoir atteint un degré plus ou moins élevé selon les cas, l’état maniaque baisse peu à peu de niveau. Le malade commence à être moins violent dans ses paroles et dans ses actes. Il parle beaucoup moins ; il ne brise et ne déchire plus ; il reprend les apparences de la raison au point de vue de son maintien, de sa toilette et de la plupart de ses actes, et il apprécie plus sainement toutes les choses du monde extérieur ; mais il n’est pas cependant revenu à lui-même. Il voit tout en beau ; il fait encore quelques projets souvent réalisables, mais peu en rapport avec sa situation actuelle et ses habitudes antérieures ; il parle toujours avec volubilité ; il a beaucoup de vivacité dans les mouvements, ne peut pas rester en place, se mêle de tout ce qui ne le regarde pas ; n’apprécie convenablement ni son état maladif antérieur, ni son excitation actuelle, en un mot, tous ceux qui l’observent pour la première fois, dans ce degré évidemment très-amoindri de son affection constatent néanmoins qu’il est encore très exalté et qu’il est loin d’être revenu à l’état physiologique. Eh bien, à cette époque de déclin de l’état maniaque, il peut se produire trois variétés de marche de la maladie.

La décroissance peut être lente et progressive ; c’est, selon nous,