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veillait pas sur eux et si les personnes de leur entourage ne les stimulaient pas à chaque instant pour secouer leur paresse et leur malpropreté et pour les obliger à sortir de leur chambre, à se nourrir ou à se vêtir convenablement.

Tel est, d’une manière très abrégée, le tableau de l’état physique et moral que présentent les malades atteints de folie circulaire, pendant la phase mélancolique de leur affection. D’après ce tableau, on voit que ce qui domine chez eux, c’est l’état d’affaissement et de dépression de toutes les facultés physiques et morales, état général de mélancolie qui constitue le fond indispensable de toutes les variétés de cette forme de maladie mentale.

Cependant, pour tenir compte de l’observation de tous les faits, il convient d’ajouter que, si cet état général de dépression existe dans tous les cas, et s’il existe seul dans un grand nombre d’entre eux, il est pourtant d’autres malades, également assez nombreux, chez lesquels la maladie acquiert un degré plus grand d’intensité et où d’autres phénomènes viennent se surajouter, surtout à certaines périodes des accès, à ce fond général de mélancolie simple ou sans délire.

On doit noter sous ce rapport deux degrés différents de l’état mélancolique.

Dans l’un de ces degrés de plus grande intensité du mal, des conceptions délirantes tristes viennent se greffer sur le fond mélancolique. Certains malades, par exemple, ont un dégoût prononcé de la vie (tædium vitæ), avec un penchant au suicide très caractérisé ; quelques-uns d’entre eux arrivent même jusqu’à l’accomplissement de l’acte. D’autres ont des idées d’empoisonnement et peuvent même en venir jusqu’au refus plus ou moins absolu des aliments. D’autres enfin manifestent des conceptions délirantes de ruine, d’incapacité, de culpabilité ou de damnation, semblables à celles des autres formes de la mélancolie, qui surnagent de temps en temps sur le fond constant et immobile de la dépression physique et morale.

Enfin, il est encore un degré plus prononcé de l’état mélancolique que l’on observe dans certains cas plus intenses de folie circulaire, ou dans quelques-uns des accès de cette affection. C’est l’état de mélancolie porté jusqu’au degré de la stupeur. Les malades restent alors absolument immobiles dans un coin, debout ou assis