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alors commun et qu’ils répètent à tout venant, dans les mêmes termes et d’une façon presque identique.

b.Pour que ce travail intellectuel puisse s’accomplir parallèlement dans deux esprits différents, il faut que ces deux individus vivent, pendant longtemps, absolument d’une vie commune, dans le même milieu, partageant le même mode d’existence, les mêmes sentiments, les mêmes intérêts, les mêmes craintes et les mêmes espérances, et en dehors de toute autre influence extérieure.

c.La troisième condition, pour que la contagion du délire soit possible, c’est que ce délire ait un caractère de vraisemblance, qu’il se maintienne dans les limites du possible ; qu’il repose sur des faits survenus dans le passé, ou sur des craintes et des espérances conçues pour l’avenir. Cette condition de vraisemblance seule le rend communicable d’un individu à un autre et permet à la conviction de l’un de s’implanter dans l’esprit de l’autre.

4oLa folie à deux se produit toujours dans les conditions ci-dessus indiquées. Toutes les observations présentent des caractères très analogues, sinon presque identiques, chez l’homme et chez la femme, comme chez l’enfant, l’adulte et le vieillard.

5oCette variété de la folie est plus fréquente chez la femme, mais on l’observe aussi chez l’homme.

6oOn pourrait faire intervenir dans sa production l’hérédité, comme cause prédisposante, lorsqu’il s’agit de deux personnes appartenant à la même famille, comme la mère et la fille, les deux sœurs, le frère et la sœur, la tante et la nièce, etc. Mais cette cause ne peut plus être invoquée dans les cas où il n’existe entre les deux malades aucun lien de parenté, par exemple lorsque la maladie se produit entre le mari et la femme.

7oL’indication thérapeutique principale consiste à séparer l’un de l’autre les deux malades. Il arrive alors que l’un des deux peut guérir, surtout le second, quand il est privé du point d’appui de celui qui lui a communiqué le délire.

8oDans la plupart des cas, le second malade est moins fortement atteint que le premier. Il peut même quelquefois être considéré comme ayant subi une simple pression morale passagère, et comme n’étant pas aliéné, dans le sens social et légal du mot. Il n’a pas alors besoin d’être séquestré, tandis que l’on fait enfermer son congénère.