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maladie, on pourrait presque dire l’affaire, avait pris d’ailleurs de si désobligeantes proportions que notre confrère était engagé à ne rien en omettre[1].

Observation VIII. — Mademoiselle X…, âgée de trente-huit ans, et sa sœur madame X…, âgée de trente-six ans, ont été admises dans l’asile des aliénés du département le 20 février 1856.

Il résulte des renseignements qui nous ont été fournis, que ces dames ne jouissaient pas depuis longtemps de leur raison, et que partant elles se faisaient remarquer par leur excentricité.

Mademoiselle X… nous occupera seule ici. Raisonnable lorsqu’il s’agissait d’intérêt, il n’en était plus ainsi lorsqu’on scrutait sa vie de famille. Logée avec son père, cette malheureuse fut toujours pour ce pauvre vieillard une source de chagrin. Que de faits absurdes d’immoralité ne lui a-t-elle pas reprochés ; que de mémoires n’a-t-elle pas adressés à l’autorité pour qu’elle eût à la protéger contre lui ; que de visites n’a-t-elle pas faites aux hommes d’affaires pour leur confier ses soucis imaginaires !

M. X… père fut accusé par elle d’avoir favorisé sur sa personne et sur celle de sa sœur un attentat énorme. Après lui avoir fait prendre un narcotique, M. X… aurait introduit dans leur chambre, elle ne sait comment, (car leur porte était toujours fermée en dedans,) M. le sous-préfet de X…, qui avait assouvi sur elle sa passion ; une grossesse, dont mademoiselle X… a attendu l’issue pendant près de deux ans, s’en serait suivie. Une chemise trouvée à son domicile portait une étiquette ainsi conçue : « Chemise que je portais dans la nuit fatale du… »

Pénétrée de cette idée, de nombreuses démarches ont été faites par Mademoiselle X… pour avoir une entrevue avec son séducteur ; des menaces ont été proférées contre lui, et elle aurait même, ne pouvant pénétrer à la sous-préfecture, cherché à l’attirer dans une autre maison, où elle et sa sœur s’étaient rendues armées de pistolets.

M. M… fils, élève du lycée, âgé de seize ans environ, ayant été pendant les vacances conduit chez son père, Mademoiselle X… après

  1. Dr Dagron, Archives cliniques des maladies mentales et nerveuses ; 1862.