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effet, au type dont nous venons d’esquisser les principaux traits. Son associé est plus délicat à définir, mais avec une recherche persévérante, on arrive à saisir les lois auxquelles obéit ce second facteur de la folie communiquée.

La première condition est qu’il soit d’une intelligence faible, mieux disposée à la docilité passive qu’à l’émancipation ; la seconde qu’il vive en relation constante avec le malade ; la troisième qu’il soit engagé par l’appât d’un intérêt personnel. On ne succombe à l’escroquerie que par la séduction d’un lucre, quel qu’il soit ; on ne cède à la pression de la folie que si elle vous fait entrevoir la réalisation d’un rêve caressé.

Nous envisagerons successivement chacune de ces données d’après les renseignements que fournit l’observation.

I

Les enfants, appréhensifs par nature, confinés dans un milieu sans expansion, sont disposés au premier chef, à devenir les échos d’un délire auquel on les associe. Leur raison indécise n’engage pas la lutte et pour peu que l’aliéné les ait faits partie prenante, ils espèrent ou ils craignent pour leur propre compte avec l’égoïsme inhérent à leur âge. Leur foi, dans quelques cas, va si loin, que l’aliéné lui-même hésite à les suivre et qu’à première vue on croirait que les enfants ont créé les délires dont ils sont le reflet. En général, et sauf de très rares exceptions, les conceptions ainsi transmises sont plus terrifiantes qu’agréables. On sait combien les enfants prédisposés aux troubles cérébraux sont accessibles à la crainte. Les manifestations spontanées consistent dans des frayeurs au moment du sommeil, des craintes dans l’obscurité, des rêves à cauchemar, des peurs de dangers imaginaires ou d’individus menaçants ; les manifestations provoquées artificiellement se meuvent dans la même sphère. Les joies de l’avenir les touchent peu ; c’est plus tard seulement, quand avec la raison croissante, la prévision s’est mieux assise qu’apparaissent les aspirations envieuses vers le plaisir, la fortune, etc., qui ne se développent guère que plusieurs années après l’éclosion de la puberté, quand l’enfant est tout près d’être un homme.