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être acceptée dans la science et dans la pratique, la doctrine de la responsabilité partielle de certains aliénés, non pas au même instant, mais dans des instants différents de leur existence. Cet aspect de la question méritait d’être signalé, surtout à propos de la folie raisonnante ou de la folie des actes, qui présente assez fréquemment dans son cours des périodes de rémittence très prononcée, ou même de véritables intermittences. La seule difficulté que l’on puisse alors rencontrer, et elle est souvent très grande, consiste à discerner si l’intermittence est réellement complète et à distinguer une simple rémission, plus ou moins marquée, d’une véritable intermittence, ou d’une guérison momentanée. Mais ici encore c’est à la clinique qu’il appartient d’éclairer la médecine légale, qui se résume dans ce cas, comme toujours, dans une simple question de diagnostic médical.

V.Conclusions.

Arrivé enfin au terme de ce discours, je crois devoir le résumer par les conclusions suivantes, présentées sous forme de questions que je propose à l’examen de la Société médico-psychologique :

1oPeut-on admettre la lésion isolée des facultés humaines, et dans la folie raisonnante en particulier, la lésion des sentiments et des instincts sans trouble de l’intelligence, ou bien doit-on reconnaître l’étroite solidarité d’action de ces facultés, à l’état sain et à l’état maladif ?

2oExiste-t-il un criterium absolu pour distinguer la raison de la folie, ou bien ce criterium ne réside-t-il pas dans l’existence d’un état pathologique caractérisé par des symptômes physiques, par des symptômes psychiques multiples et par une marche déterminée ?

3oLa folie raisonnante, ou folie morale, est-elle une forme ou une variété spéciale de maladie mentale, ou bien n’est-elle qu’une réunion artificielle de faits disparates, dans laquelle il faut chercher à découvrir des groupes plus naturels ?

4oDans quelles circonstances la séquestration est-elle nécessaire ou utile, dans les cas de folie raisonnante, soit au point de vue thérapeutique, soit pour la sécurité des malades, des familles et de la société ?