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hystériques pour pouvoir se faire une juste idée du genre d’existence que mènent ces malades, des idées absurdes qui germent dans leur intelligence, des monstruosités qu’elles présentent dans leurs sentiments, et des énormités dont elles sont capables dans leurs actes, tout en conservant publiquement les apparences de la raison, en jouant leur rôle de femmes réservées, douces et bienveillantes, de façon à induire complètement en erreur les observateurs les plus exercés.

Toutes les passions sont surexcitées en même temps ou l’une après l’autre, chez de pareilles malades, qui éprouvent le besoin impérieux de les satisfaire, et ne reculent devant aucun obstacle pour arriver à leur but.

Les unes, dominées par des idées ou des impulsions érotiques, et ne trouvant pas dans leur mari les satisfactions qu’elles recherchent, deviennent provocantes, ne s’arrêtent devant aucune difficulté pour se livrer au premier venu, souvent même, malgré leur éducation et leur position sociale, descendent jusqu’aux degrés extrêmes de l’abaissement moral et ne craignent pas de tomber dans la débauche et dans l’orgie.

Les autres, mues par un sentiment de jalousie tout à fait déraisonnable et auquel leur mari n’a pas fourni de prétexte plausible, le poursuivent incessamment de leurs inquisitions, de leurs défiances et de leurs soupçons, et empoisonnent son existence par des scènes intimes de la plus grande violence, ou par une tyrannie de détail qui le tient enchaîné et lui enlève toute liberté d’action. Passant ensuite successivement de la surveillance inquiète à la menace et aux actes violents, elles arrivent quelquefois jusqu’à rendre le public témoin de ces scènes intérieures.

D’autres enfin ne se contentent pas de tyranniser leur mari dans leur intérieur ; elles conçoivent contre lui ou contre des étrangers des projets de vengeance dont elles poursuivent l’exécution avec toutes les ressources d’une intelligence avivée et avec l’énergie persévérante d’une volonté que rien ne lasse ni ne rebute.

Si l’on se borne à étudier ainsi ces malades par le côté du caractère, si l’on ne considère que l’exaltation des sentiments et des penchants, on peut ne voir dans cet état mental qu’une exagération des passions naturelles à l’humanité : on peut croire que l’on a affaire