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tion, les considérer comme constituant une véritable folie, entraînant l’irresponsabilité civile et criminelle et la séquestration dans un asile d’aliénés. C’est là une maladie nerveuse et non une folie. On peut bien trouver, dans l’existence de cette névrose et des altérations de caractère qui en résultent, une circonstance atténuante pour certains actes accomplis par ces malades sous leur influence, mais on peut y découvrir un motif valable pour une exonération complète.

Mais entre ce caractère en quelque sorte normal des femmes hystériques et la manie hystérique proprement dite, avec délire général, trouble considérable de l’intelligence et désordre extrême des actes, constituant un véritable accès de manie, et observée dans les asiles d’aliénés, il existe un troisième état mental, lié également à l’hystérie, que l’on peut désigner provisoirement par le mot de folie raisonnante des hystériques, et qui participe à la fois des symptômes des deux autres états. Cette situation mentale représente par rapport à l’hystérie, ce qu’est, dans l’épilepsie, le trouble mental que j’ai appelé le petit mal intellectuel, état intermédiaire entre le caractère habituel des épileptiques, dans l’intervalle de leurs attaques, et les grands accès de manie épileptique avec fureur[1].

Les malades atteintes de l’état que nous appellerons folie raisonnante des hystériques, présentent dans leur moral, dans leur intelligence et dans leur conduite, la plupart des traits que nous venons d’assigner au caractère habituel des femmes hystériques ; seulement ces signes ont acquis de telles proportions et sont tellement accusés, les sentiments ont revêtu un caractère si évidemment maladif, les idées sont devenues si absurdes, les actes si violents et si déraisonnables, que tous ces symptômes ne peuvent plus être considérés comme compatibles avec la raison, et constituent dès lors, par leur réunion et leur intensité, une véritable affection mentale. Les manifestations de cette maladie sont souvent très difficiles à saisir ; elles ne sont pas toujours appréciables pour le public ; elles peuvent même être contestées par la foule et ne sont malheureusement très évidentes que dans la vie intime, au centre du foyer domestique. Il faut avoir reçu les confidences lamentables des maris de ces femmes

  1. Voyez plus haut.