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science de séparer cette étude, et cet usage, qui a certainement sa raison d’être et sa valeur surtout aux yeux du praticien, mérite d’être respecté.

Troubles intellectuels. — Les perturbations intellectuelles, qui surviennent souvent, sous des formes diverses, soit au début, soit dans le cours des affections cérébrales, n’attirent pas suffisamment l’attention des médecins. Habitués à laisser aux spécialistes l’étude de ces symptômes, ils se bornent à constater dans leurs observations l’existence du délire, de l’affaiblissement intellectuel ou de la faiblesse de la mémoire, sans entrer dans aucun détail sur la nature et les particularités du trouble des facultés. Cette lacune de la plupart des observations consignées dans la science est très regrettable ; car les manifestations intellectuelles, même dans leurs nuances les plus légères, sont des symptômes essentiels, qui, au même titre que les signes tirés de l’état des mouvements ou des fonctions sensitives, permettent de reconnaître les maladies du cerveau et de les distinguer entre elles. Ces troubles intellectuels, envisagés dans leur ensemble, se présentent sous trois formes principales : l’exaltation, la dépression ou la faiblesse, et l’aberration.

L’exaltation, soit subite, soit progressive, des facultés intellectuelles, est souvent un symptôme prodromique important des affections cérébrales, aiguës ou chroniques. Les malades qui sont sous l’imminence du délire ou des maladies congestives et inflammatoires de l’encéphale offrent fréquemment, avant l’explosion de ces affections un état d’exaltation physique et morale très marqué. Leurs facultés intellectuelles acquièrent une activité inaccoutumée qui étonne les personnes habituées à vivre avec eux ; cette activité mentale exagérée s’accompagne ordinairement d’une excitation physique concomitante, qui mérite au plus haut degré d’attirer l’attention. Les malades ont alors un besoin continuel de mouvement, une instabilité, une disposition à l’irritation ou à la colère, qui contrastent singulièrement avec leur manière d’être habituelle. Ces symptômes s’observent principalement, il est vrai, dans les périodes prodromiques des maladies mentales, surtout des formes excitées, et en particulier de la paralysie générale ; ils existent souvent pendant de longues années chez des individus qui finissent par devenir aliénés, mais ils figurent aussi plus souvent qu’on ne croit parmi les