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de l’intelligence, qui compliquent singulièrement le tableau de l’affection cérébrale, au point de vue symptomatique comme au point de vue anatomique, qui rendent sa limitation très difficile, et établissent ainsi une confusion presque inévitable entre la maladie distincte que l’on voudrait établir et le symptôme dû à des causes et à des maladies diverses.

Aussi la définition de l’aphasie par Trousseau diffère-t-elle singulièrement de celle que Broca a donnée de l’aphémie, et cela doit être, puisque celle de Trousseau doit s’appliquer à des faits beaucoup plus variés. Pour Trousseau, en effet, le caractère tiré de l’intégrité de l’intelligence et celui qui repose sur l’absence de toute autre perversion des fonctions cérébrales ne peuvent plus figurer comme symptômes essentiels et distinctifs de l’aphasie, puisqu’ils manquent dans la plupart des cas.

Des trois caractères principaux assignés à l’aphémie par Broca, il ne reste donc plus, comme constant, que le signe négatif basé sur l’intégrité des organes de la phonation, c’est-à-dire l’affirmation que cette maladie a son siège dans le centre cérébral et non dans les organes périphériques.

Les réflexions que nous venons de faire, à l’occasion des observations d’aphasie citées par Trousseau, nous amènent naturellement à l’examen des faits que nous avons nous-même empruntés à divers auteurs français et étrangers. Ces faits sont certainement trop abrégés pour pouvoir fournir les éléments d’une étude sérieuse ; mais ils sont assez nombreux et assez différents les uns des autres pour donner une idée suffisante des variétés de l’altération du langage et de la mémoire des mots dans les affections cérébrales. Ces différents degrés d’un même phénomène, s’étendant depuis l’état physiologique jusqu’à la suppression absolue de la parole, méritent d’être récapitulés rapidement pour faire comprendre combien cette question, en apparence si simple, est complexe et peut être envisagée à des points de vue très divers.

Chacun sait combien l’état physiologique lui-même comporte de degrés, sous le rapport du développement de la mémoire et de la faculté de parler, de même que sous celui de toutes les autres facultés de l’esprit humain ; mais nous n’avons ici, ni à les énumérer, ni à y insister.