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malgré l’altération de la faculté de parler, par quatre observations empruntées à Forbes Winslow :

Observation XXV. — Un militaire, qui était resté pendant plusieurs années au Canada, présentait des symptômes cérébraux consistant dans le déplacement des mots du langage, à la suite de deux attaques d’apoplexie. Sa conversation était un mélange singulier de mots auxquels aucun sens ne pouvait être attaché ; mais ce qu’il y avait de remarquable dans ce cas, c’est qu’il était en état décrire d’une manière suivie et avec une parfaite lucidité tout ce qu’il désirait communiquer aux autres ; mais, lorsqu’il essayait de parler, sa conversation était tout à fait inintelligible.

Ce malade est reparti en Amérique, et l’auteur n’a pu suivre la marche de son affection[1].

Observation XXVI. — Une dame, après une attaque de paralysie, perdit toute possibilité de parler, mais resta capable de communiquer ses désirs par écrit. Cependant, en écrivant, elle traçait invariablement le mot non quand elle voulait dire oui, et vice versa. Lorsqu’elle écrivait : Je désire que vous fassiez telle chose, elle l’écrivait en intervertissant les mots. J’ai appris que cette dame vivait encore et que ce singulier trouble de l’écriture persistait toujours[2].

Observation XXVII. — Un homme âgé de soixante-six ans, à la suite d’une attaque d’apoplexie, oublia de lire et même de distinguer une lettre d’une autre ; mais si un nom ou une phrase étaient mentionnés devant lui, il pouvait l’écrire immédiatement et avec la plus grande exactitude. Néanmoins il était incapable de lire ou de distinguer ce qu’il avait écrit ; car si on lui demandait quelle était telle ou telle lettre, ou bien comment les lettres étaient combinées, il était évident que l’écriture avait été exécutée mécaniquement, sans aucun exercice de la réflexion ou du jugement. Dans ce cas, aucun des moyens qui furent employés ne put rétablir la connaissance des lettres dans son esprit[3].

  1. Forbes Winslow, Obscure Diseases of the brain, p. 521.
  2. id., ibid., p. 520.
  3. id., Ephemerides naturæ curiosorum, p. 401.