Page:Falret - Études cliniques sur les maladies mentales et nerveuses, 1890.djvu/425

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dant il continuait à demander ses bottes ou ses souliers, tandis que c’était du pain qu’il désirait. S’il avait besoin d’un verre pour boire, il y avait cent à parier contre un qu’il demanderait un autre objet de ménage ; et si on lui apportait cet objet, il l’appelait verre ou assiette.

Il était évident que le malade avait conscience de son erreur ; car lorsque l’expression convenable lui était fournie, par une autre personne, et qu’on lui demandait si c’était bien là ce qu’il désirait, il reconnaissait son erreur et se rectifiait lui-même en employant le mot exact.

Observation II. — Le Dr Wilhem Nasse, de Bonn[1], rapporte l’observation d’un homme d’une trentaine d’années, qui, à la suite d’accès apoplectiques répétés étant paralysé de la moitié du corps, avait cependant conservé la jouissance de ses facultés intellectuelles. Il pouvait, grâce à l’intégrité des mouvements de sa langue, se faire bien comprendre, mais au milieu de ses phrases, il employait souvent des mots tout à fait déplacés ; ce qu’il remarquait immédiatement, et dans son mécontentement, il cherchait à y remédier par des gestes ou des périphrases. Lorsqu’on prononçait devant lui le mot désiré, il le répétait aussitôt avec facilité, et pouvait également le mettre par écrit. Après de nouvelles congestions répétées, la faculté de s’exprimer diminua progressivement chez ce malade et arriva enfin peu à peu à un état de démence.

Observation III. — Observation communiquée par le Dr Alex. Hood[2]. Il s’agit d’un serrurier qui tout à coup commença à parler d’une manière incohérente, ne put se faire comprendre que par signes et devint incapable de prononcer les noms de tous les objets de la nature. Sa mémoire des objets eux-mêmes paraissait complètement intacte, mais la possibilité de désigner exactement les personnes et les choses avait complètement disparu chez lui, et ce n’est que peu à peu, dans l’espace de quatre mois, qu’il parvint à recouvrer l’usage de cette faculté. Dans cet état, il parlait sans difficulté. Il avait la conscience parfaite de sa faiblesse, et il montrait par sa conduite et

  1. Dr Wilhem Nasse, Journal de psychiatrie, 1852, p. 527.
  2. Hood, Memoirs of the phrenological Society of London, janvier 1834, p. 235.