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valles de raison. Nous pensons donc, en thèse générale, que dans les cas douteux, on doit faire pencher la balance du côté de la validité des actes, toutes les fois qu’il s’agit de questions civiles, tandis qu’on doit faire pencher du côté de l’irresponsabilité lorsqu’il s’agit de questions criminelles.

En terminant cette revue médico-légale rapide relative à l’épilepsie, nous voulons encore aborder brièvement deux questions qui concernent également l’existence civile de ces malades : nous voulons parler de leur mariage et de leur séquestration.

De tout temps, les médecins, prenant en considération les inconvénients graves qui peuvent résulter, pour la personne qui épouse un épileptique, des attaques convulsives elles-mêmes ou du trouble mental qui les accompagne si fréquemment, ont cherché à détourner ces malades du mariage ou même à le leur interdire. À ces motifs déjà si décisifs, on doit encore ajouter les dangers qui proviennent pour les enfants de la loi d’hérédité, qui peut perpétuer chez eux la maladie, soit sous sa forme primitive, soit plus souvent encore transformée en d’autres névroses, en aliénation mentale ou en idiotisme.

Legrand du Saulle[1] a résumé avec habileté ces divers motifs et il n’a pas craint de conclure à l’interdiction absolue du mariage pour les épileptiques. On ne peut, selon nous, poser scientifiquement une règle aussi sévère, et l’on doit admettre des exceptions. Du reste, quand même les médecins adopteraient une manière de voir aussi exclusive, la législation ne pourrait jamais la consacrer, ni forcer les individus à s’y soumettre. Cependant il est remarquable qu’en fait, la plupart des épileptiques ne se marient pas[2]. Nous avons cité néanmoins[3], l’observation curieuse d’un épileptique qui s’est marié pendant qu’il était dans l’asile des aliénés de Montpellier, avec l’autorisation du médecin en chef, le Dr Rech. Nous avons rapporté un autre fait également intéressant en sens con-

  1. Legrand du Saulle, Annales médico-psychologiques, no de janvier 1861.
  2. Cette circonstance explique peut-être, jusqu’à un certain point, la contradiction qui existe entre les divers auteurs relativement à la fréquence de l’hérédité de l’épilepsie. Leuret, en effet (Archives générales de médecine, 1843) et le Dr Petit, de Nantes, ont nié que l’épilepsie fût très souvent héréditaire.
  3. Obs. 8.