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des colères subites et non provoquées, des impulsions variées se succédant à courts intervalles, des envies de se détruire, de briser de déchirer les objets qui tombaient sous sa main ; il a eu des oublis extraordinaires, des défaillances absolues de la mémoire, des maux de tête, des étourdissements, il a aperçu des étincelles lumineuses, des visions, des objets effrayants.

C’est au milieu de cet état d’anxiété morale, d’impulsions instinctives ou automatiques, et de confusion extrême des idées, que les épileptiques, poussés, comme ils le disent, par une force invincible qui domine leur volonté, vont se jeter à l’eau, se donnent un coup de couteau dans la poitrine, ou se livrent à des actes de violence et de destruction sur les objets qui les entourent ; ou bien encore ils s’emparent du premier instrument venu pour se précipiter avec violence sur la première personne qu’ils rencontrent, la frappent à coups redoublés, et font souvent ainsi successivement plusieurs victimes. Ils frappent machinalement, sans motifs, sans intérêt, sans savoir ce qu’ils font, ou du moins avec une conscience très vague de leurs actes. En général, aussitôt après l’acte accompli, il y a subitement une sorte de réveil, plus ou moins complet selon les cas. Les malades alors, appréciant plus ou moins la gravité de l’acte qu’ils viennent de commettre, se sauvent pour se soustraire aux conséquences de leur crime, ou bien, le plus souvent, ils vont eux-mêmes se remettre entre les mains de la justice et avouent leur action, dont ils n’ont ordinairement qu’un souvenir très imparfait, mais dont ils se rappellent quelquefois les principaux détails avec plus de netteté que les circonstances antérieures qui ont eu lieu pendant leur accès.

Tels sont les faits que l’on observe habituellement pendant les accès de petit mal intellectuel, chez les épileptiques.

La connaissance de ces caractères a une grande importance pour la médecine légale ; elle permet de soupçonner l’existence d’attaques d’épilepsie qui seraient restées ignorées, et de démontrer aux magistrats la réalité d’un état maladif complexe, au lieu de se borner à disserter sur les mobiles d’un acte de folie instantanée. Or, tous ces renseignements scientifiques sont bien nécessaires pour éclairer la justice dans des cas d’une appréciation aussi délicate. En effet, ces accès de trouble intellectuel sont ordinairement d’assez