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au moment où il a accompli l’acte pour lequel il est traduit devant les tribunaux ? S’il était aliéné, il doit être considéré comme irresponsable ; sinon il doit être condamné comme coupable.

Mais, si l’on ne peut regarder les épileptiques comme partiellement responsables, dans un moment donné de leur maladie, on peut admettre plus facilement une responsabilité variable selon les instants où l’on observe ces malades. Quelques auteurs, s’appuyant sur ce principe, beaucoup plus vrai et plus pratique que le précédent, ont cherché un moyen d’apprécier la liberté morale des épileptiques dans le nombre, la durée et l’intensité des accès convulsifs. Ainsi, par exemple, on a établi que plus les accès épileptiques étaient fréquents à intervalles rapprochés, plus ils étaient prolongés et intenses ; plus les actes incriminés avaient été commis à une époque rapprochée des accès convulsifs, plus ils devaient être considérés comme irrésistibles et automatiques, et moins le malade devait en être rendu responsable. Quelques auteurs même, et en particulier Zachias[1], pour consacrer ce principe par une règle pratique applicable à tous les cas, ont proclamé que tout épileptique devait être regardé comme irresponsable pour les actes accomplis par lui dans l’espace des trois jours qui précèdent ou qui suivent une attaque d’épilepsie.

Ce criterium, inspiré par une pensée d’indulgence envers les épileptiques, et par le désir de concilier les exigences de la justice avec les données de la science médicale, aurait certainement des avantages si l’on persistait dans les errements de la médecine légale actuelle ; si l’on continuait à se demander simplement si un épileptique est aliéné, oui ou non, sans chercher à étudier et à décrire les caractères particuliers de son délire.

Mais ces formules générales et absolues offrent toutes le grave inconvénient de dire trop ou trop peu, selon les cas. Avec la prétention de s’appliquer indistinctement à tous les faits, elles se bornent à un énoncé vague, qui ne répond avec vérité à aucun des cas particuliers qui se présentent à l’examen du médecin expert. Pour la médecine légale de l’épilepsie, comme pour celle de l’aliénation mentale, il importe donc de sortir de ces généralités vagues, qui ne présentent aucune utilité pratique, et qui abandonnent en définitive

  1. Zachias, Quæstiones medico legales ; Lugduni, 1674.