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tions qui leur sont adressées ; ils y répondent plus directement et d’une manière plus exacte, et s’aperçoivent plus souvent de ce qui se passe autour d’eux, que la plupart des aliénés atteints de délire général avec excitation. L’incohérence moins grande du délire, et la netteté plus prononcée des idées pendant les accès de manie épileptique, est d’autant plus curieuse à signaler qu’elle contraste singulièrement avec l’absence presque complète de tout souvenir de l’accès après sa cessation, absence de souvenir qui est également un symptôme presque constant des accès de manie épileptique.

Pour terminer l’énumération rapide des principaux caractères qui permettent de distinguer la manie épileptique de la manie ordinaire, disons que les accès ne se prolongent ordinairement que pendant quelques jours, et ont ainsi une durée beaucoup moins longue que les autres accès de manie. Enfin leur cessation est habituellement aussi brusque que l’a été leur invasion. En quelques heures, quelquefois même plus rapidement, ces maniaques reviennent presque sans transitions à leur état normal. C’est à peine si, dans quelques cas, ils présentent une courte période de légère stupeur ou de torpeur physique et morale, avant le retour complet à la raison. Ils guérissent de leur accès comme on sort d’un rêve ; ils se réveillent, comme à la suite d’un cauchemar pénible, en ne conservant presque aucun souvenir des faits qui ont eu lieu pendant toute la durée de leur maladie.

Nous avons décrit séparément les deux formes du délire épileptique, auxquelles nous avons donné les noms de petit mal et de grand mal, parce que ces deux espèces de trouble intellectuel se présentent à l’observateur, et surtout au médecin légiste, sous deux aspects tout à fait différents. Le calme des mouvements, la lucidité partielle des idées, les apparences de raison, en un mot, que l’on observe chez les épileptiques atteints du petit mal intellectuel, contrastent au plus haut point avec l’agitation maniaque, le désordre extrême des actes et la loquacité incessante de ceux qui sont affectés du grand mal. Ces caractères établissent entre les deux états des différences aussi tranchées que celles que l’on constate chez les aliénés, entre les délires partiels et les délires généraux. Ces deux états ne pouvaient donc, sans inconvénients, être confondus dans une même description, qui, pour s’appliquer à des situations mentales aussi différentes,