Page:Falret - Études cliniques sur les maladies mentales et nerveuses, 1890.djvu/358

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

honte que leur fait ressentir leur affreuse maladie ; tantôt au contraire ils ont un sentiment intérieur de bien-être et de satisfaction, qui les porte à nourrir de vastes projets ou à concevoir les espérances les plus irréalisables dans leur triste situation. Tantôt ils sont taquins, disposés à la controverse, à la discussion, aux querelles, et même aux actes de violence ; tantôt au contraire ils montrent une douceur, une bienveillance, une affectuosité, et des sentiments religieux de soumission et d’humilité, aussi exagérés et aussi peu motivés que l’étaient précédemment les manifestations opposées.

Les mêmes contrastes que l’on observe dans leurs sentiments, on les constate dans le degré de leur intelligence et dans la nature des idées qui les préoccupent. Rien n’est mobile comme leurs dispositions d’esprit et le niveau de leur intelligence. Tantôt les épileptiques ont l’intelligence confuse, la mémoire affaiblie, l’attention et la compréhension difficiles. Ils éprouvent alors une grande difficulté à réunir leurs pensées, et ont eux-mêmes conscience de l’obtusion de leur intelligence et de la confusion de leurs idées. Tantôt au contraire ils présentent une véritable activité intellectuelle, une circulation rapide des idées, qui correspond à un certain degré d’excitation cérébrale. Ils peuvent alors se livrer à un travail suivi, dont ils seraient incapables dans d’autres moments, et se rappeler certains faits ou certaines idées que dans d’autres instants ils semblaient avoir complètement oubliés.

Cette irrégularité, qui existe dans leurs sentiments et dans le degré de leur intelligence, se reflète nécessairement dans leurs paroles et dans leurs actes. Aussi leur conduite et leur manière d’être envers les personnes qui les entourent sont-elles essentiellement variables. Pendant certaines périodes de leur existence, ils se montrent laborieux, exacts, attentifs aux travaux de leur profession, soumis et dociles, et ceux qui vivent avec eux, et qui les emploient, n’ont qu’à se louer de leurs relations ou de leurs services. Ainsi, dans les asiles d’aliénés, on occupe fréquemment les épileptiques en qualité d’infirmiers, ou même on leur confie des positions plus importantes pendant un certain temps. Mais, dans d’autres moments, la conduite de ces malades se modifie tout à coup et présente les plus grandes irrégularités. Ils sont alors incapables de remplir les fonctions qui leur avaient été données ; ils deviennent négligents, paresseux, indolents