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fréquemment la couleur rouge ou pourpre, un spectre ou un fantôme ; il entend des bruits de cloches ou une voix déterminée qui prononce un même mot ; quelquefois enfin il sent l’odeur d’une même substance. Ces idées, ces souvenirs ou ces sensations fausses, qui diffèrent singulièrement d’un malade à un autre, se reproduisent ordinairement, avec une singulière uniformité chez le même malade, à chaque nouvel accès. Il est curieux d’ajouter que très souvent ce souvenir, cette idée ou cette image, sont la reproduction de l’idée ou de la sensation qui ont provoqué chez ce malade la première attaque épileptique. Beaucoup d’entre eux, en effet, devenus épileptiques à la suite d’une vive émotion morale ou d’une profonde terreur, voient apparaître dans leur esprit ou sous leurs yeux, à chaque nouvel accès, les circonstances pénibles ou la scène effrayante qui ont déterminé chez eux la maladie pour la première fois.

Dans l’immense majorité des cas d’épilepsie, il ne peut être question de troubles intellectuels observés pendant l’accès. La perle absolue de connaissance est, en effet, un caractère essentiel de cette maladie. On a même indiqué ce caractère comme signe principal propre à la distinguer soit de l’hystérie, soit d’autres affections nerveuses à forme convulsive, mais sans perte complète de connaissance. Dans presque tous les cas d’épilepsie véritable, le malade ne profère aucune parole, n’entretient aucun rapport avec le monde extérieur pendant l’accès, et ne conserve, après sa cessation, aucun souvenir de ce qui s’est passé en lui pendant toute sa durée. On n’a donc aucun moyen de constater l’existence d’un trouble intellectuel quelconque pendant les attaques épileptiques ordinaires et complètes. Néanmoins, pour ne rien omettre, il importe de signaler qu’il existe certaines attaques incomplètes ou avortées d’épilepsie, pendant lesquelles on peut constater une exception à cette règle générale ; et cependant, la nature épileptique de ces attaques ne peut être contestée, puisqu’elles se produisent chez des épileptiques, et alternent chez eux avec les grandes attaques ou avec les vertiges, à intervalles assez rapprochés. Pendant ces accès avortés, les malades, sans rapport aucun avec le monde extérieur, profèrent certains sons incompréhensibles, ou articulent quelques mots sans suite, qui semblent indiquer une préoccupation pénible ou une profonde terreur. Dans ces attaques incomplètes, qui tiennent le milieu entre le simple vertige épileptique