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puisque le malade, ne jouissant pas de la liberté de ses mouvements, n’a aucun moyen de manifester, ni par les gestes ni par la parole, ses pensées s’il en a pendant l’accès, et que la mémoire lui faisant presque constamment défaut après l’accès, il lui est impossible de rendre compte d’un travail intellectuel qui aurait pu avoir lieu, mais dont le souvenir n’existe plus. Mais il ne s’agit pas ici de résoudre ce problème presque insoluble, de la persistance possible de l’intelligence dans les cas où il n’y a ni manifestation pendant l’accès ni souvenir après sa cessation. Nous laissons de côté tous ces faits, qui sont cependant les plus nombreux ; nous voulons seulement parler de cas exceptionnels dans lesquels il y a quelques manifestations d’intelligence pendant l’accès et quelques souvenirs après qu’il a disparu. On a cité, en effet, des faits dans lesquels, en adressant la parole aux malades pendant l’accès, on provoquait la sécrétion des larmes, quelques mouvements des yeux ou des muscles de la face, ou bien même on parvenait à faire cesser brusquement l’accès.

Dans ces cas, il est évident que les facultés intellectuelles n’étaient pas suspendues, puisque les malades comprenaient le sens des paroles qui leur étaient adressées. Eh bien, doit-on, par ce seul fait de l’existence d’un travail intellectuel, exclure du cadre de la catalepsie et faire passer dans le domaine de l’extase ces faits qui, sous les autres rapports, présentent les véritables caractères de la catalepsie ? Il est d’autres cas encore dans lesquels la conservation de l’intelligence ne se constate pas pendant l’accès, mais devient évidente après sa disparition, par la conservation de la mémoire des malades, qui racontent des faits qui se sont passés pendant leur accès, dont ils ont eu conscience, sans avoir eu aucun moyen de faire connaître au dehors qu’ils étaient en état de les observer. Dans les deux observations que nous avons rapportées, la conservation de l’intelligence a évidemment existé, au moins à certaines périodes des accès ou de la maladie ; et cependant, ces deux faits, exceptionnels sous ce rapport, ne peuvent guère être exclus du cadre de la catalepsie.

Les réflexions que nous venons de faire relativement à l’état de l’intelligence dans la catalepsie s’appliquent également à la sensibilité. Un des caractères les plus essentiels de cette maladie, un caractère sine qua non en quelque sorte, et presque aussi impor-