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n’étudiait-on, à cette époque, que les périodes ultimes de cette affection, et était-on arrivé à lui assigner une durée moyenne de six mois à un an environ. On n’était pas encore remonté au véritable début de la maladie.

Une seconde période dans l’histoire de la paralysie générale a été caractérisée par la tendance à envisager cette affection comme une maladie spéciale, ayant ses symptômes physiques et moraux, son anatomie pathologique et sa marche particulière. Cette opinion, déjà défendue, dès l’origine, en 1822, par Bayle (qui avait donné à cette maladie le nom de méningite chronique), a été surtout introduite dans la science par Parchappe, qui, en 1840, l’avait appelée folie paralytique, tout en admettant quelques cas rares dans lesquels la paralysie générale pouvait survenir comme complication des folies anciennes.

À cette période en succéda une autre.

Jusqu’alors on n’avait étudié la paralysie générale que dans les asiles d’aliénés. À partir de 1846, on commença à en observer quelques exemples dans les hôpitaux ordinaires, ou dans la pratique civile. Requin, Sandras, Lunier, Brierre de Boismont, Duchenne de Boulogne, publièrent quelques observations de paralysie générale progressive, dite « sans délire », ou du moins avec un degré très léger de démence simple, sans conceptions délirantes.

On vit alors deux opinions se produire à ce sujet parmi les médecins : les uns proclamaient qu’il existait deux espèces de paralysie générale, l’une avec délire et l’autre sans délire ; les autres, au contraire, soutenaient que cette distinction n’était possible à établir que dans les premières périodes de la maladie, et que toute paralysie générale dite « sans délire », finissait toujours par aboutir à l’aliénation ou à la démence paralytique. Cette dernière opinion, surtout défendue par MM. Baillarger et Lunier, finit par prévaloir. On en vint ainsi à constituer la paralysie générale progressive comme une maladie tout à fait spéciale, distincte de la folie proprement dite et intermédiaire entre les autres affections cérébrales et les diverses formes de l’aliénation mentale.

On en était arrivé à ce point, quand le professeur Lasègue publia sa thèse pour l’agrégation en 1853[1], et lorsque je soutins

  1. Lasègue, Paralysie générale progressive ; 1853.