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guérison, des malades qui paraissent avoir guéri réellement dans certains cas exceptionnels. Pourquoi, dira-t-on, ne pourrait-il pas en être de même des aliénés paralytiques, qui sans doute aboutissent presque toujours à la mort, mais auxquels la science ne doit pas enlever absolument toute chance de salut ? Pourquoi nier l’authenticité des faits, peu nombreux, il est vrai, de guérison cités par certains auteurs distingués, dont personne ne peut contester la compétence et le mérite ? J’accepte volontiers, pour ma part, la question ainsi posée et la comparaison établie entre la curabilité de la paralysie générale et celle de la phtisie. Je l’accepte d’autant plus volontiers qu’en songeant à la nature des lésions qui caractérisent la paralysie générale, surtout à son début, on a lieu de s’étonner qu’elle ne soit pas plus souvent curable.

On ne comprend guère, en effet, pourquoi la congestion sanguine et l’afflux de sérosité à la surface du cerveau et de ses membranes, coïncidant avec une altération très légère de la substance grise superficielle, on ne comprend pas facilement, dis-je, pourquoi ce travail pathologique, existant dans des points très limités du cerveau, ne serait pas susceptible de guérison dans les points affectés, au même titre et beaucoup plus encore que les foyers de l’hémorragie cérébrale, et pourquoi de nouvelles congestions et de nouvelles lésions du même genre devraient nécessairement se produire dans d’autres parties des circonvolutions, entraîner ainsi une aggravation successive de la maladie et amener enfin la mort dans un espace de temps plus ou moins éloigné. Si l’on envisage la nature et le mode de succession des lésions, qui donnent lieu aux symptômes de la paralysie générale des aliénés, on doit donc s’étonner de la gravité constante de cette maladie, et par conséquent on ne doit pas repousser la possibilité de sa guérison. Du reste, cette curabilité de la paralysie générale ne nuirait en rien à sa constitution comme espèce morbide, attendu que beaucoup de maladies, admises comme parfaitement démontrées, la variole par exemple, peuvent se terminer par la mort ou par la guérison, sans que cette différence dans le mode de terminaison, empêche la détermination de l’espèce nosologique. C’est donc là une simple question d’observation et non une question de doctrine. Malheureusement, l’expérience a prouvé que dans l’immense majorité des cas, la paralysie générale s’est jusqu’ici ter-