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de véritables accès de delirium tremens aigu, reconnaissables à leurs caractères spéciaux.

Les paralysies générales d’origine saturnine méritent aussi d’être comparées à la paralysie des aliénés et sont souvent difficiles à distinguer. M. Desvouges, interne des hôpitaux[1], a cherché à prouver que l’on observe dans les asiles d’aliénés des paralysies générales d’origine saturnine, mais qu’elles ne présentent aucun symptôme spécial qui permette de les distinguer ni théoriquement ni pratiquement, de la paralysie générale des aliénés. Les faits qu’il cite à l’appui de son opinion, et qui ont tous été recueillis à Bicêtre, dans le service de Moreau (de Tours), sont en effet des exemples de paralysie générale, tout à fait analogues à la paralysie des aliénés, puisqu’ils offrent même le délire des grandeurs caractéristique. Mais ces faits ne prouvent, à nos yeux, qu’une seule chose, c’est que le plomb, comme le mercure, peut figurer parmi les causes plus ou moins éloignées de la paralysie des aliénés, ainsi que l’ont déjà noté Esquirol, M. Calmeil, et d’autres auteurs. Mais s’ensuit-il qu’il ne puisse pas exister d’autres paralysies générales, méritant plus spécialement le nom de paralysies générales saturnines, et qui devraient alors être soigneusement séparées de la paralysie des aliénés ? Duchenne de Boulogne[2], cite quelques exemples de ce genre qui me paraissent assez probants, et établit quelques signes différentiels, basés sur l’excitabilité électrique, qui me semblent dignes d’être signalés. Il pense que, dans la paralysie générale saturnine, la contractilité électrique est diminuée ou abolie, mais qu’elle l’est surtout dans certains muscles et non pas dans d’autres, et il fait reposer sur ce signe de diagnostic différentiel cette espèce de paralysie et toutes celles qui pourraient être confondues avec elle. À ce signe, nous ajouterons que la paralysie saturnine généralisée commence ordinairement par être partielle et bornée aux muscles de l’avant-bras, qu’elle est accompagnée des autres caractères de l’intoxication saturnine, qu’elle peut ne pas offrir d’embarras dans la parole, enfin qu’elle ne présente pas ordinairement de perturbation dans les facultés intellectuelles.

  1. Desvouges, Annales médico-psychologiques ; 1856.
  2. Duchenne (de Boulogne), De l’Électrisation localisée ; 1855.