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la plus fâcheuse. Ce qui contribue surtout à perpétuer cette confusion, ce sont d’abord les difficultés mêmes du sujet ; les causes d’erreurs nombreuses qui, dans chaque cas particulier, rendent souvent le diagnostic très obscur ; le peu de temps écoulé depuis l’époque où ces faits nouveaux ont été signalés et observés pour la première fois ; enfin la longue durée de ces maladies, qui permet rarement à un même observateur de les suivre pendant tout le cours de leur développement. Mais cette assimilation de maladies très disparates, réunies sous un même nom, tient surtout à ce que l’on perd de vue trop facilement le type primitif qui a servi de point de départ à la découverte des faits nouveaux. On oublie trop que la paralysie générale des aliénés n’est pas, à proprement parler, une véritable paralysie ; que dans cette maladie, le trouble de la motilité consiste dans une grande irrégularité, dans une absence de précision et de coordination des mouvements, et qu’il se rapproche beaucoup plus des tremblements nerveux, et même de la chorée, que d’une paralysie complète telle qu’on l’observe dans les autres affections du cerveau, de la moelle ou du système nerveux. Si on n’avait pas perdu de vue ce point de départ, on n’aurait jamais songé à rapprocher de la paralysie générale des aliénés un grand nombre de faits dans lesquels la paralysie ne se présente pas avec les mêmes caractères, et dans lesquels dès lors on ne doit pas s’étonner d’observer d’autres symptômes, une autre marche, et d’autres lésions.

Pour établir un diagnostic différentiel entre les diverses paralysies générales et la paralysie des aliénés, il importe donc avant tout de bien indiquer sur quelles bases repose ce type qui sert de terme de comparaison, et de rappeler brièvement les caractères spéciaux de cette paralysie qui permettent de la distinguer de toutes les autres. Ces caractères peuvent se résumer ainsi :

1oCette paralysie est générale, c’est-à-dire qu’elle atteint en même temps toutes les régions du corps, sans prédominer d’une manière marquée dans aucune d’elles.

2oElle est incomplète, depuis le début de l’affection jusqu’à sa terminaison, c’est-à-dire que, même à la période ultime, les malades, forcés de garder le lit, remuent encore assez facilement les bras, les jambes, et toutes les parties du corps. Du reste, son intensité varie beaucoup d’un moment à l’autre, mais elle n’est