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de Duchenne, sont des maladies sur la nature distincte ou identique desquelles il est bien difficile de se prononcer définitivement, peut-être y verra-t-on plus tard deux variétés d’une même affection plutôt que deux espèces morbides différentes. Les opinions ont été trop partagées sur la nature de l’atrophie musculaire progressive dans la discussion qui a eu lieu à l’Académie de médecine[1] pour que l’on puisse affirmer, dans l’état actuel de la science, si c’est une véritable paralysie ou bien si elle a son siège dans les muscles ou le système nerveux périphérique. Or, selon que l’on adopte telle ou telle opinion, on rapproche ou on éloigne cette affection de la paralysie spinale décrite par Duchenne. Quant à nous, malgré les différences signalées par cet auteur et par Brierre de Boismont, nous ne pouvons nous empêcher de remarquer l’extrême analogie qui existe entre les faits rapportés par eux sous le nom de paralysie sans aliénation et ceux relatés par Aran et Cruveilhier sous celui d’atrophie musculaire progressive. Dans ces deux ordres d’observations, en effet, il y a intégrité parfaite de l’intelligence et de la sensibilité et lésion exclusive de la motilité, double caractère fondamental assigné par Aran et Cruveilhier à l’atrophie progressive. Dans les deux cas, il y a atrophie des muscles et même transformation graisseuse, ainsi que Duchenne le constate pour un fait de paralysie spinale dont l’autopsie a été faite dans le service d’Andral ; dans les deux cas encore, la paralysie commence par être partielle, se généralise assez lentement et marche progressivement des extrémités vers le centre ; dans les deux cas, enfin, certains muscles de la même région sont plus fortement atteints que d’autres. De plus, toujours d’après le même auteur, la contractilité électrique n’est que diminuée et non abolie dans la paralysie spinale (excepté à la dernière période) ; elle l’est inégalement dans les muscles d’une même région ; souvent même, au début de la maladie, il est difficile de distinguer si elle est réellement affaiblie et dans quels muscles existe cet affaiblissement, car il n’atteint d’abord que quelques muscles isolément, comme dans l’atrophie. Ainsi, Duchenne reconnaît qu’il n’y a guère entre ces deux maladies, même au point de vue de l’électricité, que des nuances dans le degré de diminution de la contractilité élec-

  1. Bulletin de l’Académie de médecine, 1855.