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lysie considérée chez les aliénés. Ces auteurs ont décrit la maladie avec tant de soin, qu’ils ont laissé peu de chose à faire, sous ce rapport, à leurs successeurs.

Jusque-là, la paralysie générale avait été étudiée exclusivement dans les asiles consacrés aux maladies mentales, et portait encore le nom de paralysie générale des aliénés. Delaye avait cité, il est vrai, un fait auquel il avait cru pouvoir donner le nom de paralysie générale incomplète sans délire. Esquirol, Bayle et Calmeil, ainsi que Parchappe, avaient aussi signalé des cas où la maladie avait débuté par les symptômes paralytiques ; Ferrus, dans ses cours à l’hospice de Bicêtre[1], avait insisté également sur l’existence de quelques cas de ce genre. Mais ces faits étaient considérés par tous les aliénistes comme très exceptionnels ; d’ailleurs, tout le monde reconnaissait que, dans ces circonstances mêmes, le trouble de l’intelligence ne tardait pas à suivre de près la lésion de la motilité, et que, dans l’immense majorité des cas, il la précédait. Deux opinions seulement existaient alors parmi les médecins spécialistes relativement à cette affection ; les uns, comme Bayle et Parchappe, admettaient qu’elle constituait une espèce particulière de maladie mentale, distincte, dès le début, des autres formes de la folie, à laquelle le premier donnait le nom de méningite chronique, et le second, celui de folie paralytique ; les autres, avec Esquirol et M. Calmeil, considéraient la paralysie générale comme une complication ou même comme une terminaison de toutes les formes de l’aliénation mentale.

Tel était l’état de la science, lorsque, en 1846, Requin[2] rapporta un cas de paralysie générale observée pendant longtemps sans trouble de l’intelligence, et crut dès lors devoir imposer à cette maladie le nom de paralysie générale progressive, puisqu’elle pouvait se présenter avec ou sans délire, sans cesser néanmoins de constituer une seule et même affection. C’est de cette époque environ que datent les premiers travaux sur la paralysie générale sans délire, travaux qui ont profondément modifié les idées des médecins, au sujet de cette maladie.

En même temps, on commençait à observer dans les hôpitaux de

  1. Ferrus, Gazette des hôpitaux, 1838.
  2. Requin, Éléments de pathologie, t. II, p. 90.