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frontale, et enfin il a été obligé de cesser son travail, il y a deux mois environ, à cause du tremblement et de l’affaiblissement général qu’il éprouvait, ainsi que de l’obscurcissement de ses idées et de la faiblesse de sa mémoire, phénomènes pour lesquels il entre à l’hôpital. Il est atteint, en effet, d’un tremblement général qui n’a rien d’excessif, qui paraît plus marqué dans certains moments et surtout aux bras ; il a une conscience parfaite de son état et s’en préoccupe, sans s’en affliger outre mesure. Il n’a pas éprouvé de congestions à la tête, n’a pas de bégayement et n’a présenté ni agitation ni délire caractérisé. Son intelligence est légèrement obscurcie, lente et obtuse, mais il répond d’une manière suivie aux questions qu’on lui adresse et se plaint surtout d’un affaiblissement de la mémoire des faits récents. Pendant la nuit, il dit éprouver des rêves nombreux, principalement relatifs à des sensations de la vue. Il revoit les choses qu’il a vues autrefois en Espagne, et, l’une des dernières nuits, par exemple, il a vu défiler devant ses yeux des troupeaux de bœufs. Il lui arrive souvent de parler tout haut pendant son sommeil.

Il dit ne pas éprouver d’étourdissements et n’avoir jamais perdu connaissance, mais sa vue s’est considérablement affaiblie : lorsqu’il est sur un trottoir, il éprouve la plus grande difficulté à ne pas heurter les personnes qu’il n’aperçoit pas très nettement. La vue ne paraît pas plus affaiblie d’un côté que de l’autre ; la pupille gauche est un peu plus large que la droite, sans être cependant très dilatée. L’ouïe est également affaiblie, surtout à droite, à ce qu’il prétend ; il éprouve une céphalalgie frontale presque constante. La langue tremble, lorsqu’elle est tirée de la bouche, ainsi que les muscles des lèvres, mais ce tremblement n’a rien d’excessif et n’existe pas quand les muscles sont au repos ; les muscles des sourcils, des paupières, et des diverses parties de la face, tremblent également quand le malade leur imprime des mouvements. Lorsqu’on le fait souffler, les deux joues se dilatent également, et il n’y a pas de déviation apparente de la commissure labiale. La parole ne paraît pas embarrassée ; il semble bien exister de temps en temps une sorte d’hésitation dans le langage, mais elle paraît plutôt tenir à la lenteur de la pensée qu’à une gêne dans les mouvements ; il dit lui-même n’avoir jamais éprouvé de difficulté à parler, et que si quelques personnes l’ont prétendu cela tenait à ce qu’il était habitué à parler