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par le plomb fondu. Il a toujours été bon travailleur, quoiqu’un peu lent, et ne paraît s’être livré à aucune espèce d’excès, pas même de boisson. Il n’a jamais éprouvé de convulsions ni de perte de connaissance. Celui qui l’a précédé dans la rude occupation dont il était chargé et pour laquelle on trouvait difficilement un ouvrier, a été, dit-on, obligé de la quitter, au bout de dix ans, et jeune encore, pour des infirmités analogues à celles dont celui-ci est atteint. Ce malade a commencé à ressentir les effets fâcheux de sa profession quatre ans environ après avoir commencé à l’exercer. Il a d’abord éprouvé beaucoup de coliques qui se renouvelaient fréquemment avec toute la violence des tranchées, et qui se sont reproduites, à différentes époques, pendant tout le temps qu’il a continué à travailler, et ont même été souvent accompagnées de vomissements, qui sont surtout devenus très fréquents dans les dernières années.

On prétend que sa maladie a débuté par un étourdissement qu’il a éprouvé en étant devant le fourneau, et à la suite duquel il serait tombé sans connaissance, et se serait même brûlé. Néanmoins ce n’est que petit à petit que l’on a commencé à s’apercevoir qu’il vacillait en marchant, comme un homme ivre, et cela il y a environ neuf ans. Quoique le tremblement dans la marche ne fût pas très prononcé, cependant tout le monde s’en apercevait, et les gamins même le suivaient. À cette époque, sa langue n’était pas encore embarrassée, mais il éprouvait de temps en temps des étourdissements assez intenses qui lui semblaient partir de l’estomac. Lorsqu’il se sentait étourdi, il était obligé de s’appuyer sur les objets environnants, tombait même quelquefois, mais sans perdre jamais connaissance ; car il parlait aussitôt qu’il était à terre, cherchait à se relever lui-même, ou bien appelait quelqu’un pour lui aider. Il y a quatre ou cinq ans environ que sa langue a commencé à s’embarrasser ; c’était comme une sorte de bégayement qui est survenu peu à peu et a augmenté graduellement. Ce n’est que depuis trois ou quatre ans que ses bras ont commencé à trembler un peu et qu’il laissait de temps en temps tomber les objets. Les jambes, au contraire, étaient depuis longtemps affaiblies. Il marchait difficilement, et il lui semblait même qu’il marchait sur des épines. On était obligé de l’accompagner, de crainte qu’il ne se laissât tomber, et, malgré cette précaution, il tombait encore quelquefois. Il n’a jamais