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distinctifs les plus importants sont ceux qu’on peut tirer des troubles des sens et principalement de la vue. Tandis que chez les paralytiques, au début, ces troubles des sens sont très exceptionnels, on observe très fréquemment, au contraire, chez les individus soumis à l’intoxication alcoolique, avant même que la paralysie ne soit survenue, des bourdonnements d’oreille et des troubles variés de la vue, tels qu’éblouissements fréquents, obscurcissements de la vision, sensation d’un corps noir passant devant les yeux, ou bien, au contraire, éclairs, étincelles, objets scintillants avec affaiblissement manifeste de la vision. Le malade a parfaitement conscience de ces troubles des sens : il les accuse et même s’en afflige, comme nous allons le dire pour tous les autres phénomènes de sa maladie.

Pour terminer cet exposé rapide des signes distinctifs tirés de l’état physique, nous dirons enfin que chez les individus qui ont longtemps abusé des liqueurs alcooliques et qui sont dans l’état de paralysie dont nous parlons, il existe souvent des troubles assez marqués dans les fonctions du tube digestif et, en particulier, des vomissements muqueux, survenant principalement le matin, symptôme qui n’existe pas chez les paralytiques, dont les fonctions digestives sont parfaitement intactes et souvent même exagérées.

Signes psychiques. On a souvent contesté la possibilité de découvrir quelques traits caractéristiques dans les troubles intellectuels produits par l’intoxication alcoolique soit aiguë, soit chronique. On croit généralement aujourd’hui que cette recherche est vaine et stérile, puisqu’on retrouve chez ces malades les quatre formes principales de maladies mentales : la mélancolie, la monomanie avec hallucinations, la manie et la démence. On fait, en un mot, le même raisonnement qu’à propos de la folie paralytique nous avons cherché à réfuter précédemment. Ce n’est pas le lieu de traiter ici une question aussi importante, et nous ne pouvons entrer incidemment dans les détails qui seraient nécessaires pour l’élucider ; mais nous ne pouvons nous empêcher de signaler à grands traits les caractères psychiques les plus saillants, qui nous paraissent appartenir plus spécialement à l’intoxication alcoolique. Une première distinction indispensable et à laquelle on ne songe pas généralement, consiste à séparer, sous ce rapport, l’intoxication aiguë, ou delirium tremens proprement dit, de l’intoxication