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mais il est bien différent, selon nous, de faire figurer le plomb parmi les causes d’une maladie aussi nettement caractérisée dès le début que l’est la folie paralytique, ou d’admettre, d’un autre côté, que l’intoxication saturnine peut donner lieu à une paralysie générale, différant, par l’ensemble de ses symptômes et par sa marche, de la folie paralytique, et méritant d’être décrite séparément sous le nom de paralysie générale saturnine.

Il est sans doute possible d’admettre que des individus, ayant longtemps employé les préparations saturnines, se trouvent atteints ultérieurement de folie paralytique bien caractérisée. Mais il ne faut pas confondre, ce nous semble, ces faits très exceptionnels, s’ils existent, avec les faits de la véritable paralysie générale saturnine, dans lesquels la différence totale des symptômes et de la marche se trouve réunie à la différence de la cause pour constituer une espèce spéciale. Nous avons, pour notre part, observé deux faits de paralysie générale, qui nous ont paru dépendre d’une intoxication saturnine. Dans l’un, il existait une paralysie complète du mouvement de toutes les parties du corps, qui ne présentait pas d’analogie véritable avec la paralysie des aliénés ; nous le rappellerons ici, uniquement pour montrer jusqu’où peut conduire la réunion de faits dissemblables, sous le nom vague de paralysie générale. L’autre, au contraire, offrait une extrême analogie avec les faits rapportés sous le nom de paralysie générale sans délire, et méritera de nous arrêter plus longtemps.

La première observation est celle d’un jeune homme qui, d’abord atteint de paralysie saturnine des muscles extenseurs des avant-bras, fut vainement traité en 1849 par l’électricité et la cautérisation transcurrente dans le service de Bricheteau, au no 49 de la salle Saint-Ferdinand à l’hôpital Necker ; il revint un an après, dans le service, atteint d’une paralysie complète des bras, des jambes et du tronc. Cette paralysie était si prononcée qu’elle le contraignait à garder le lit et l’empêchait même de se maintenir sur son séant. Il mourut presque subitement peu de temps après cette seconde entrée à l’hôpital ; et à l’autopsie, nous trouvâmes un ramollissement de la partie supérieure de la moelle.

On voit que ce fait n’a rien d’absolument concluant relativement à la nature saturnine de la paralysie générale. L’action du plomb,