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un relevé de cas récents, au lieu de porter en même temps sur les cas plus chroniques qui ont davantage échappé à l’attention des observateurs. Elle prouve du moins que l’embarras de la parole peut exister dans l’empoisonnement par le plomb, et que, par conséquent, il doit être signalé comme cause d’erreur dans le diagnostic de la paralysie générale des aliénés.

Quant à la paralysie générale saturnine, elle a été moins étudiée encore que l’embarras de la parole, quoique quelques auteurs en aient parlé et en aient même cité des exemples. Cette lacune de la science tient, selon nous, à ce que l’on suit rarement les intoxications saturnines jusqu’à la fin de la maladie, excepté dans les cas où il survient des accidents graves pour lesquels le médecin est appelé, comme, par exemple, les attaques épileptiformes et le délire. Elle nous paraît tenir également à ce que, dans les cas où les médecins se trouvent en position d’observer une paralysie générale saturnine, ils sont disposés à ne tenir compte, dans le diagnostic, que du fait de la paralysie générale, sans remonter à sa cause et à sa nature. Ils se bornent alors à classer ces faits parmi les paralysies générales, au lieu de les considérer comme des exemples d’une paralysie de nature spéciale. La confusion devient plus facile et plus inévitable encore dans l’état actuel de la science, lorsqu’une sorte d’oblitération de l’intelligence, comme celle que produit quelquefois un empoisonnement saturnin très prolongé, vient se joindre à cette paralysie générale. On rencontre de temps en temps des cas de ce genre, que l’on se contente de faire figurer parmi les démences avec paralysie, sans remonter dans l’histoire de ces malades pour y rechercher la marche particulière de leur affection. L’observation de la dernière période, détachée ainsi de tous les antécédents, prête évidemment à une confusion difficile à éviter. MM. Calmeil, Esquirol, etc., ont fait figurer, il est vrai, le plomb, ainsi que le mercure et l’alcool, parmi les causes possibles de la paralysie des aliénés. M. Delasiauve[1], a également cherché à diviser la paralysie générale des aliénés d’après ses causes, et il a admis une variété saturnine. C’est déjà un pas accompli dans la voie dont nous parlons ; c’est même une preuve à l’appui de l’opinion que nous venons d’émettre ;

  1. Delasiauve, Annales médico-psychologiques ; 1851.