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remonter péniblement la pente, qu’il a lentement descendue, et il s’élève de nouveau, par une synthèse savante, plus rigoureuse et plus vraie que la synthèse primitive, à la connaissance des faits généraux et des lois générales.

Telle est la marche inévitable de l’esprit humain, non seulement dans la formation du langage, mais dans toutes les sciences, dans toutes les branches des connaissances humaines.

Nier la nécessité des classifications dans les sciences, ce serait donc nier les conditions mêmes d’existence de l’esprit humain. Aussi, lorsque des écoles soi-disant exactes ont la prétention de se priver de tout classement des faits dans les sciences d’observation, et de se borner à l’examen direct et individuel des cas particuliers, l’esprit de l’homme, qui ne peut se plier à ces exigences systématiques, incompatibles avec sa nature, se fait à lui-même des modes de classement tout à fait vicieux et incomplets, dont il se sert provisoirement, en l’absence d’une classification régulière et vraiment scientifique.

Puisque les classifications dans les sciences sont indispensables à l’esprit humain et qu’il ne saurait s’en passer, quels sont donc les principes sur lesquels doivent reposer les classifications les plus propres à remplir le but que l’on se propose en classant les faits ? Comment les rapprocher par leurs analogies véritables et les séparer par leurs différences essentielles, de manière à pouvoir conclure du placement d’un fait dans une classe, non seulement à l’ensemble des caractères qu’il présente, mais encore à son évolution, c’est-à-dire à pouvoir conclure du présent au passé et à l’avenir.

Ces principes de classification, nous n’avons pas à les rechercher, ni à les inventer. Ils sont tout trouvés. Ils ont été découverts par des hommes de génie qui nous ont précédés dans l’histoire de la science. Nous n’avons qu’à les puiser dans des sciences plus avancées que les nôtres, dans les sciences naturelles, dans la botanique par exemple (la plus perfectionnée de toutes sous ce rapport), et à les appliquer ensuite à la médecine en général, et à notre spécialité en particulier. Ces principes peuvent se résumer en deux mots : il faut rechercher des méthodes naturelles, c’est-à-dire des modes de classement reposant sur un ensemble de caractères, subordonnés et coordonnés, et se succédant dans un ordre déterminé, et non des