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Ils ont ordinairement une assez grande activité ; mais ils sont rarement susceptibles de poursuivre, pendant un certain temps, un but avec persévérance, même dans la direction de leurs idées prédominales. Ils se livrent, il est vrai, quelquefois, au début de leur affection, à des actes qui demandent une certaine suite dans les idées, comme, par exemple, à des spéculations, à des entreprises, à des voyages ; mais encore faut-il que le but soit peu éloigné et puisse être rapidement atteint, car ils ne seraient pas capables de persister longtemps dans une même voie ; à plus forte raison, sont-ils incapables plus tard d’esprit de suite et de persévérance dans la poursuite d’un but déterminé. En résumé, ils ont un besoin considérable d’activité et de mouvement ; mais il est plus automatique que volontaire, et ne peut être que temporairement dirigé vers un but précis. Ils ne tirent jamais aucune conséquence des faits qui se passent autour d’eux, et sont en quelque sorte privés de cette réflexion sur soi-même qui permet à l’homme de se rendre compte de sa situation et de relier le passé à l’avenir.

Après ces généralités sur l’état de l’intelligence, de la sensibilité, de la volonté et des actes, chez les aliénés paralytiques, considérés d’une manière générale, il importe d’entrer davantage sur le terrain de la pratique, en spécifiant, avec quelques détails, la nature des idées qui surgissent dans leur esprit et qui se manifestent chez eux par la parole. Les caractères principaux de ces idées délirantes découlent naturellement des caractères généraux que nous venons d’énumérer ; mais, dans un sujet aussi complexe et aussi important à préciser nettement en vue de l’application pratique, on ne doit pas redouter les développements nécessaires pour bien faire comprendre la portée de ces caractères, au risque même de s’exposer à quelques répétitions. Avant de parler des idées de grandeur et de satisfaction qui sont le plus souvent prédominantes, nous devons énumérer les caractères communs à toutes les idées délirantes qui surviennent chez ces malades. Nous croyons pouvoir les résumer en disant que les idées délirantes des paralytiques sont multiples, mobiles, non motivées et contradictoires entre elles.

Ces idées sont multiples, très nombreuses, souvent même presque innombrables. Il existe, il est vrai, sous ce rapport, d’assez grandes différences selon les individus et selon la forme de la