Page:Falret - Études cliniques sur les maladies mentales et nerveuses, 1890.djvu/107

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

« Les maniaques et les monomaniaques, dit-il, n’ont, dans ce cas, ni la même énergie d’attention, ni la même force d’association des idées, ni la même ténacité de résolution, ni la même opiniâtreté de résistance. » Il ajoute, à propos d’une observation particulière, qu’il lui est arrivé de pronostiquer une paralysie générale chez un aliéné, parce qu’il suffisait de lui faire une promesse pour le calmer et pour le faire renoncer aux projets auxquels il paraissait le plus fortement tenir. Quelques pages auparavant, il avait déjà fait une réflexion analogue à propos d’un autre malade qu’il avait jugé paralytique, par suite de la trop grande facilité avec laquelle il avait consenti à son séjour dans une maison de santé.

Plusieurs autres auteurs ont exprimé la même pensée presque dans les mêmes termes. Mais ce n’est pas ici le lieu d’entrer dans un historique détaillé à cet égard ; je dirai seulement que M. Baillarger a constaté le même fait de la manière suivante : « Les monomanes ordinaires diffèrent des monomanes paralytiques par leur opiniâtreté à soutenir leurs idées ; les monomanes paralytiques, au contraire, à cause de la perte de la mémoire, n’ont pas de suite dans les idées, ils font des erreurs grossières et se contredisent à chaque instant ».

Le Dr Ducheck, de Prague[1], s’est exprimé plus catégoriquement encore ; mais là se borne à peu près ce que les auteurs ont dit à ce sujet.

Les caractères spéciaux du délire paralytique nous semblent mériter de bien plus longs développements. Ils nous paraissent importants à signaler avec détails, non seulement pour la description exacte de la maladie, mais surtout comme moyen pratique de diagnostic et de pronostic, qui peut souvent devenir pour le médecin aussi utile que l’embarras de la parole lui-même. Je suis loin certainement de nier l’importance extrême de ce dernier signe, mais je pense qu’il ne peut pas toujours suffire à lui seul, que dans certains cas ou certains moments, il peut faire défaut et être alors suppléé avantageusement par les signes tirés de l’étude détaillée des phénomènes psychiques, et que, dans tous les cas, il est des circonstances difficiles où la réunion de ces deux ordres de phénomènes est loin d’être superflue pour le diagnostic ou le pronostic de la paralysie générale.

  1. Ducheck, Mémoire sur la démence avec paralysie. (Vierteljahrsschrift für praktisch Medicin ; Prag., 1851.)