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pourraient démentir une loi aussi généralement vraie et aussi unanimement acceptée. La folie paralytique est donc une forme déterminée de maladies mentales, bien distincte de toutes les autres, puisque l’on peut d’avance, dès son plus léger début, non seulement prévoir sa marche ultérieure et sa terminaison fatale, mais même déterminer sa durée moyenne, qui oscillera entre deux ou quatre ans et sera ordinairement de trois ans environ. Je sais bien que la plupart des auteurs, et en particulier Bayle et Calmeil, ont indiqué, pour cette maladie, une durée moyenne moins considérable ; mais cette appréciation ne tient-elle pas à ce qu’en général ces auteurs ont fait dater la maladie, soit du moment où les phénomènes paralytiques commençaient à devenir très appréciables, soit de l’époque de l’entrée des malades dans les asiles, ou du moins d’une époque très voisine ? Or non seulement ce n’est pas toujours là le moment exact de l’explosion évidente du délire, mais c’est loin d’être toujours celui du début réel de la maladie. On comprend, du reste, combien il est difficile d’apprécier avec exactitude la durée réelle de cette maladie lorsqu’on y fait rentrer la période dite des prodromes, qui doit cependant être considérée déjà comme une première période, et dont on peut rarement fixer exactement la durée, à l’aide des comptes rendus incomplets et peu éclairés des parents. Aussi peut-être une étude plus attentive de cette période amènera-t-elle plus tard à augmenter encore la durée moyenne de cette maladie, surtout si l’on tient compte des cas où elle débute sans délire évident, et dans lesquels la paralysie semble quelquefois exister, pendant un temps assez long, sans que le délire se manifeste d’une manière saillante. Quel que soit le chiffre qu’il convient d’adopter, il est certain et admis par tous que cette maladie a une durée moyenne susceptible d’être déterminée ; or c’est là un argument des plus puissants en faveur de l’existence et de la spécialité de la forme paralytique de la folie.