Page:Falret - Études cliniques sur les maladies mentales et nerveuses, 1890.djvu/10

Cette page a été validée par deux contributeurs.

La description du délire de persécution, séparé d’abord par Lasègue, en 1852, du grand groupe des mélancolies d’Esquirol, pour constituer une espèce particulière de maladie mentale, étudiée, depuis lors, dans ses périodes successives et dans son évolution naturelle, a été une nouvelle atteinte à la classification de nos maîtres.

Enfin, Morel est venu porter un dernier coup à ces doctrines par sa théorie générale des dégénérescences et par sa classification étiologique, qui ont été le point de départ des modifications les plus importantes accomplies depuis lors dans la médecine mentale.

Si nous ajoutons, à tous ces faits importants, les études faites sur le délire épileptique et l’épilepsie larvée, les travaux sur les délires émotifs, la folie avec conscience, la folie du doute et le délire du toucher ; si nous y joignons les travaux considérables accomplis, depuis la découverte de Broca, sur l’aphasie et ses diverses variétés, et sur les localisations cérébrales, par Charcot et par son école de la Salpêtrière, qui ont réagi sur toute la pathologie cérébrale, ainsi que les recherches de Lasègue, sur les cérébraux et les traumatismes du cerveau, sans parler de beaucoup d’autres travaux importants accomplis dans ces dernières années, et sur lesquels il nous est impossible d’insister dans cette revue trop rapide pour être complète, nous pouvons dire avec vérité que notre science spéciale, qui a encore conservé, pour la forme, les dénominations de nos maîtres et une apparente immobilité, a singulièrement progressé depuis 1840, date de la mort d’Esquirol. Un mouvement considérable s’est produit depuis lors dans la pathologie mentale, mouvement puissant, auquel nous assistons aujourd’hui, qui va grandissant de jour en jour, dont nous ressentons à chaque instant de nouvelles secousses et qui aboutira bientôt à la destruction complète de l’édifice élevé par nos maîtres depuis le commencement de ce siècle. Ce monument est aujourd’hui ruiné de toutes parts. Toutes les divisions intérieures sont détruites ou déplacées ; on a modifié toutes les délimitations et toutes les distributions intérieures ; on n’a laissé subsister que la façade, qui est elle-même lézardée, mais qui conserve encore toutes les apparences de l’ancien édifice et peut donner l’illusion de sa conservation intérieure.

Mais nous sommes dans une période de transition et de transfor-