Page:Falconnet - Petits poèmes grecs, Desrez, 1838.djvu/234

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de la sage Alcmène et donnèrent la vie à deux jumeaux célèbres par leur force et par leurs victoires.

Quel est le mortel assez stupide pour ne pas chanter les louanges d’Hercule et n’avoir aucun souvenir de la fontaine de Dircé, près de laquelle furent élevés Hercule et son frère Iphiclès ? L’un et l’autre ont exaucé mes vœux ; je célébrerai leurs bienfaits aux accens de ma lyre. Puissent les Grâces m’éclairer de leurs douces lumières, pour chanter dignement la victoire que trois fois Télésicrate a remportée dans Égine sur la colline de Nissa. Un si glorieux triomphe illustre sa patrie, et met pour toujours ce héros à l’abri de la tristesse et des regrets d’une défaite. Aussi n’est-il aucun citoyen de Cyrène, ami ou ennemi de Télésicrate, qui ne publie ce que cet athlète puissant a fait pour leur commune gloire, et qui ne soit à son égard fidèle observateur de la maxime du vieux Nérée : « Louez avec franchise même un ennemi, lorsqu’il s’est signalé par de brillans exploits. »

Combien de fois, ô Télésicrate, t’ai-je vu couronné aux solennités de Pallas, qui reviennent à des temps réglés, et dans ces fêtes olympiennes qu’on célèbre dans les vallées profondes et sinueuses de l’Attique, et dans tous les jeux des autres contrées de la Grèce : alors quelles mères ne désirèrent de l’avoir pour fils ! quelles vierges ne demandèrent aux dieux un époux tel que toi !

Mais la soif des vers me tourmente ; et, au moment de terminer mes chants, je ne sais quelle voix me presse de rappeler la gloire de tes nobles aïeux. Je dirai donc comment ils vinrent dans Irasse, ville d’Antée, pour disputer la main d’une jeune Lybienne que sa beauté faisait rechercher et de ses illustres parens et d’une foule d’étrangers : chacun, à l’envi soupirait après le bonheur de cueillir cette rose virginale qu’Hébé à la couronne d’or venait de faire éclore. Mais Antée prépare à sa fille une union plus glorieuse. Il sait qu’autrefois dans Argos, Danaüs fixa promptement l’hymen de ses quarante-huit filles, avant que le soleil eût achevé la moitié de sa carrière. Il plaça ses filles à l’extrémité de la lice et voulut que parmi tous les prétendans le vainqueur à la course méritât seul de devenir son gendre.

À son exemple, le roi de Lybie veut donner à sa fille un époux digne d’elle. Il la pare de ses plus riches ornemens et la place pour but à l’extrémité de la carrière. Puis s’avançant au milieu des jeunes guerriers : « Que celui d’entre vous, leur dit-il, qui, dans sa course rapide aura le premier touché le voile qui la couvre l’emmène dans sa maison. » Soudain Alexidamas s’élance, franchit l’espace, prend la nymphe par la main et la conduit en triomphe au milieu des Nomades si renommés par leurs coursiers. On le couvre de couronnes, sous ses pas la terre est jonchée de fleurs… Mais déjà combien de fois avant ce triomphe n’avait-il pas été porté sur les ailes de la Victoire !!

X.

À HIPPOCLÈS, THESSALIEN,

Vainqueur à la course diaulique.

Ô fortunée Lacédémone, et vous heureuses campagnes de la Thessalie où règnent, sortis d’une même tige, les descendans d’Hercule, le plus vaillant des guerriers, serait-ce à contretemps que je vous célébrerais aujourd’hui dans mes chants ? Non… mais Pytho, Pélinnée et les enfans d’Aleüas m’appellent ; ils veulent que mes plus nobles accens consacrés, à la gloire des héros, chantent la victoire d’Hippoclès.

À peine ce jeune athlète eut-il pris part à nos jeux solennels que l’auguste assemblée des Amphictyons réunis dans les vallées du Parnasse le proclama vainqueur de ses rivaux, pour avoir deux fois parcouru la vaste étendue de la carrière. « Le mortel qu’un dieu daigne conduire voit toujours un commencement prospère couronné d’une fin glorieuse. » C’est ainsi, ô Apollon ! qu’Hippoclès a vaincu sous tes auspices.

Cependant il doit encore à sa valeur naturelle l’honneur de marcher sur les traces de Phricias, son père. Deux fois vainqueur à Olympie, sous l’armure pesante de Mars, cet heureux père fut encore couronné à la course légère, dans les prairies qu’ombrage le rocher de Cirrha. Puisse le Destin favorable répandre sur le père et le fils la gloire et le bonheur ! Puissent aussi leurs richesses croître comme des fleurs brillantes !

Le sort, pour eux ne fut jamais avare de ses dons ; il leur a prodigué ces triomphes qui font l’orgueil des enfans de la Grèce. Ah ! plaise aux immortels de leur être toujours propices, et