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Il en faudrait dire autant de M. de Montépin, de M. Jules Mary, de M. Hector Malot, dont la critique n’a presque jamais soufflé mot, et qui ont fait leur chemin sans elle avec une facilité et une rapidité incroyables.

Remarquez qu’en sens inverse, la critique fait, périodiquement, avec insistance, l’éloge chaleureux de cinq ou six auteurs qui sont en bons termes avec le journalisme ; et que ces cinq ou six auteurs ne se vendent jamais. Je me dispense ici de citer les noms ; mais vous les connaissez aussi bien que moi.

Autre face de la question. Il est un homme que la presse parisienne ne peut pas souffrir. J’ignore pourquoi. C’est M. Loti. Celui-ci, non seulement on n’en parle point dans les journaux de Paris pour le louer, mais on en parle pour l’assommer chaque fois que l’occasion s’en présente. Le succès de M. Loti marche toujours triomphalement.

Exemples tirés du théâtre. L’immense majorité de la critique, avec une insistance fougueuse et avec grande raison, selon moi, s’est acharnée à faire accepter M. Henri Becque par le public. Il n’y a jamais eu moyen d’assurer un succès prolongé à une pièce de M. Becque. — La Gotte, de Meilhac, avait tellement séduit les critiques, qu’unanimement et en y revenant à plusieurs reprises, la critique dramatique a crié au public que Gotte était un chef-d’œuvre. Rien n’y a fait. La pièce a échoué.