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nistrateurs de la « sainteté » et des relations entre les hommes et les dieux, et ils donnent à ces rapports un caractère de commerce honteux, et rien n’est plus capable de dépraver les hommes que cette administration de la sainteté : « Voici le langage que le peuple et les poètes [et les prêtres, comme on verra plus loin ; et les trois groupes humains que Platon n’aime point sont bien là] ont sans cesse dans la bouche… De tous ces discours, les plus étranges sont ceux qu’ils tiennent au sujet des dieux et de la vertu. Les dieux, disent-ils, n’ont souvent pour les hommes vertueux que des maux et des disgrâces, tandis qu’ils comblent les méchants de prospérités. De leur côté, des sacrificateurs et des devins, assiégeant les maisons des riches, leur persuadent que s’ils ont commis quelque faute, eux ou leurs ancêtres, elle peut être expiée par des sacrifices et des enchantements, par des fêtes et par des jeux, en vertu du pouvoir que les dieux leur ont donné. Si quelqu’un a un ennemi à qui il veut nuire, homme de bien ou méchant, peu importe, il peut à très peu de frais lui faire du mal : ils ont certains secrets pour lier le pouvoir des dieux et en disposer à leur gré. Et ils confirment tout cela par l’autorité des poètes… Pour prouver qu’il est facile d’apaiser les dieux, ils allèguent ces vers d’Homère : « Les dieux mêmes se laissent