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morale et de consanguinité entre les politiciens d’Athènes et les sophistes.

Ils n’inquiétaient pas l’aristocratie conservatrice, ne s’occupant guère de politique, et si, comme on peut le supposer par la considération d’Aristophane, les conservateurs flairaient peut-être et pressentaient dans ces philosophes des novateurs ou des pères de novateurs, d’autre part ils étaient attirés et séduits par le talent et l’élégance, très aristocratiques dans un certain sens du mot, de ces très brillants artistes de la parole.

Il est probable encore, quoique je n’en sache rien, que les prêtres et le « parti clérical », qui a parfaitement existé à Athènes, comme on s’en assure par l’examen du procès de Socrate, n’avaient aucune prévention contre les sophistes et, tout au contraire, les voyaient d’un œil assez bon. Ce qui déteste un parti, c’est ce qui peut ou ce qui veut le remplacer. Ce que les prêtres athéniens pouvaient détester ou craindre, c’étaient les philosophes, les vrais philosophes, un Socrate ou un Platon, apportant soit une doctrine morale, soit une doctrine métaphysique et une doctrine morale destinées à remplacer la religion ou capables d’en prendre la place. Les sophistes, non seulement ne se piquaient point d’apporter rien de pareil, mais encore, par leur abstention presque absolue et presque systé-