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rent. Nous repensons donc la pensée de Dieu. Comme il a ordonné le monde les yeux fixés intérieurement sur elles, de même nous ordonnons quelques parcelles de l’univers suivant un plan dont il nous a permis d’apercevoir et de saisir quelques traits. Les idées gouvernent donc le monde et l’homme, du sein même de l’intelligence divine.

Il importe de savoir cela ou de le croire pour être persuadé que toute œuvre humaine doit n’être pas détournée de sa nature, qui est originellement divine. Nous travaillons sur le tracé, en quelque sorte, des idées éternelles ; lorsque nous ne nous inspirons pas uniquement d’elles, qui sont pures et qui sont divines, nous nous montrons indignes d’avoir reçu le privilège de les apercevoir partiellement ou de les entrevoir. L’Idée éternelle nous oblige jusqu’à un certain point matériellement et elle nous oblige moralement tout à fait. Elle nous oblige jusqu’à un certain point matériellement, parce que nous ne pouvons rien faire tout à fait en dehors d’elle et en nous passant d’elle : nous ne pouvons créer. Elle nous oblige moralement tout à fait, précisément parce qu’elle ne nous oblige matériellement que jusqu’à un certain point : nous pouvons agir, non contre elle, mais en dépit d’elle et d’une façon indigne d’elle, et c’est