Page:Faguet - Le Pacifisme.djvu/82

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chole sont restés les types légendaires des héros des guerres de magnificence. La guerre est une chose si abominable que, selon ses différents aspects, elle est représentative de tous les vices de l’humanité et que par conséquent il fallait qu’elle fût aussi l’expression de la vanité humaine, et ce sont les guerres de magnificence qui représentent la vanité sur les champs de bataille. On fait la guerre par vanité. On tue par vanité. C’est burlesque et c’est hideux. Les poètes, qui trop souvent exaltent merveilleusement les pires des vices, ont trouvé de beaux mots pour colorer celui-là. Virgile dit :

Vincet amor patriæ laudumque immensa cupido,[1]

montrant bien que l’amour de la patrie ne suffirait pas à armer le bras des héros et qu’il y faut encore le désir effréné de la gloire, des éloges. On verse le sang, des fleuves de sang, pour une cantate. Il faut répondre à un vers par un autre vers :

O miseras hominum mentes, o pectora cæca ![2]

Les guerres de magnificence justifieraient presque par comparaison les guerres de conquête ; car enfin l’anthropophage avait raison qui disait aux civilisés : « Vous ne mangez pas vos prisonniers ? Alors pourquoi vous battez-vous ? » Les

  1. « La nature se taira devant l’image de la patrie et le fantôme de la gloire. »
  2. « Ô malheureux esprit des hommes ! ô coeurs aveugles ! »