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pacifiques que se dépensera la combativité de l’espèce humaine pendant de longues années. La lutte économique n’est certes pas plus raisonnable que la guerre impulsive et elle résulte de la même impulsivité ; on peut dire encore qu’elle est tout aussi meurtrière ; cependant elle est moins sanglante, moins apparemment et sensiblement féroce, et elle peut être considérée comme une espèce de progrès, comme une espèce d’adoucissement des mœurs belliqueuses. Il faut observer aussi qu’à la considérer comme une guerre, elle est guerre civile en même temps que guerre internationale. Le commerçant français lutte contre le commerçant français autant que contre le commerçant anglais ou allemand. — Voilà, dira-t-on, qui rend cette forme de guerre plus odieuse que l’autre ! — Mais, non ! Les exagéreurs et les paradoxistes de notre camp ont coutume de dire qu’en fait de guerre ils n’admettent que les guerres civiles. Littéralement ils ont tort et nous condamnons les guerres civiles aussi énergiquement que les guerres entre nations ; mais s’ils parlaient de luttes en général, de luttes non sanglantes quoique très funestes encore, et en particulier de luttes économiques, ils n’auraient pas si tort ; car la lutte entre concitoyens a des chances d’être moins âpre et elle donne une matière à la combati-