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tion et de dégradation. La vie de caserne corrompt les jeunes gens juste au moment de leur vie où ils sont sans force de résistance contre les agents de démoralisation et juste au moment où les habitudes que l’on contracte ont une influence sur la vie tout entière. Cela doit faire frémir, surtout lorsque l’on songe qu’autrefois c’était une faible partie de la nation et la plus incorruptible, en ce sens qu’elle était déjà corrompue, qui passait par cette école et qui du reste y restait, ce qui faisait qu’elle ne pouvait guère contaminer le reste du peuple. Plus tard c’était encore une partie de la nation, plus considérable, mais une partie seulement, qui passait sept ans dans l’armée et qui ensuite rentrait dans la nation civile ; on faisait encore, pour ainsi parler, la part du feu. Maintenant c’est la nation tout entière qui pendant deux ou trois ans, à l’âge des passions naissantes et de la faiblesse du caractère, est placée, comme à dessein, dans les meilleures conditions du monde pour contracter les vices les plus odieux et les souillures les plus indélébiles. Quand on songe que l’idéal moral, et nous parlons d’idéal pratique, est l’homme marié à vingt ans et père à vingt et un, et que c’est précisément à vingt ans que l’État prend le jeune homme pour l’empêcher de se marier, le dégoûter du mariage et souvent le condamner à ne jamais