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très matériel. » — Sans doute, et je reconnais bien que, moralement, M. X... est un coquin, beaucoup plus que s’il arrosait ses fleurs ; mais quoi ? Vos prétentions sur lui sont indéterminées, sont indéfinies et indéfinissables. Je ne sais pas, je ne puis pas savoir ce qu’il faudrait qu’il fit pour conjurer la maladie nerveuse qui vous menace, jusqu’à quel point vous pouvez pousser le droit que vous revendiquez de l’importuner. Vous ne le savez pas non plus. Ces choses-là n’ont pas de mesure. Nous prenons donc le parti de ne pas tenir compte des souffrances morales que l’exercice de la liberté individuelle entraîne pour les autres, parce que le préjudice a ici quelque chose d’indéterminé et d’infini, et nous définissons la liberté individuelle le droit qui appartient à tout homme de vivre et d’agir à sa guise sans faire de mal à personne et sans gêner personne sérieusement, c’est-à-dire matériellement.

La liberté individuelle a été visée très précisément et plus que toute autre par les Déclarations des droits de l’homme de 1789 et de 1793. Cela tient à ce qu’aucune liberté n’avait été plus méprisée, surtout plus mal définie et plus mal connue avant 1789. Il est à remarquer que l’ancienne société, qui a fort bien connu un certain nombre de libertés, respectait beaucoup plus les libertés de corps, les libertés d’associations, que les libertés personnelles et individuelles, tout au contraire de la