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des habitudes des deux tiers de la population et qui feront horreur à l’autre tiers ? Il est impossible. Du moins, il est moralement impossible.

Il ne faut donc pas dire précisément : Le grand État a deux buts superposés, celui du petit et celui du grand. Il faut dire, le grand État a deux buts, celui du petit, mais celui-ci réduit à son minimum, et puis celui du grand.

Or, quel est le but d’un petit État, non menacé par aucun voisin ? subsister, rien de plus, être tranquille. Il ne lui faut donc, comme chose d’État, qu’une justice et une police, pour que l’ordre règne dans la rue et pour que les différends entre les citoyens ne s’éternisent pas et ne s’enveniment pas. C’est là, dans un petit État, le but minimum de l’État. Il pourrait se proposer, sans danger et même avec quelques avantages, cinq ou six autres desseins. Il pourrait vouloir « faire fleurir les arts » ; il pourrait vouloir enseigner ; il pourrait vouloir régler les choses de religion ; il pourrait vouloir veiller aux bonnes mœurs domestiques, se faire rendre compte par le père et par la mère de famille de la façon dont ils vivent ensemble et dont ils élèvent leurs enfants, régler l’hygiène domestique. Mon Dieu, oui ; dans une fratrie ces choses ne seraient pas de très offensantes ni pénibles indiscrétions. Mais comme dans un grand État elles le seraient peut-être, réduisons le but du petit État à son minimum pour savoir ce que le grand État en doit