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Ce n’est pas que les progressistes aimassent véritablement le ministère Waldeck-Rousseau ; non certes ; mais il existait, il était dès lors une institution nationale, quelque chose à quoi un conservateur ne touche pas sans un frisson religieux et ne voit pas ébranler sans, quoique le détestant, s’empresser à le soutenir.

Et enfin toutes les bonnes dispositions libérales du parti progressiste sont paralysées par la terreur où il est continuellement de passer pour clérical. — Comme il est modéré, il a toujours peur qu’on ne lui dise : « Pourquoi êtes-vous modéré si ce n’est parce que, au fond, vous êtes clérical et pour pouvoir ménager le clergé, sous prétexte de modération ? Vous êtes des cléricaux déguisés. » — Comme il est un peu libéral, il a toujours peur qu’on ne lui dise : « Pourquoi êtes-vous libéral si ce n’est parce que, au fond, vous êtes clérical ? Puisque les libertés ne peuvent profiter en France qu’aux cléricaux, quiconque est libéral est clérical. Vous êtes libéraux, donc vous êtes cléricaux. Vous êtes des cléricaux masqués. Mais on vous reconnaît sous le masque. Non ? Vous n’êtes pas cléricaux ? Prouvez-le donc en étant oppresseurs et en déchirant les Droits de l’homme. Il n’y a que cette preuve qui soit sûre. C’est la pierre de touche. »

A ce raisonnement tout le libéralisme des progressistes s’écroule tout d’une pièce. Il n’y a pas un progressiste qui reste libéral dès qu’il a le soupçon