Page:Faguet - Le Libéralisme.djvu/321

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

choses et nous nous croyons suffisamment libres, oubliant cette maxime excellente, et du reste d’une évidente vérité, de la Déclaration des droits de l’homme : « Il y a oppression contre tout le corps social quand un seul de ses membres est opprimé. »

Mais à quoi nous faisons moins attention encore, c’est aux instruments d’oppression qui sont dans nos lois, dont un gouvernement autoritaire peut se servir quand il voudra, dont un gouvernement excité, poussé et menacé par sa clientèle passionnée et avide, sera forcé de se servir, et dont en effet, à l’heure où je parle, on commence déjà à user fort honnêtement. La liberté individuelle existe en France et est généralement respectée. Cependant, vous l’avez vu, un homme arrêté sous une inculpation, traduit devant la cour d’assises et acquitté, n’est pas en sûreté ! La Déclaration des droits de l’homme de 1793 dit que « tout homme, est présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable » ; la République française de 1900 a pour principe qu’un homme est présumé coupable quand il a été déclaré innocent. Et elle le condamne et elle l’exile.

Ne croyez donc pas que votre liberté individuelle vous soit assurée. Il n’en est rien. Pour que votre liberté individuelle vous soit ravie, pour que vous puissiez être arrêté, incarcéré et exilé sans passer devant les juges ou, le jury, ou, ce qui est plus fort,