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Eh bien, la quantité de sacrifices que l’Etat peut et doit demander aux citoyens pour remplir son office et pour ne remplir que son office varie selon les pays et selon les circonstances ; c’est incontestable ; mais elle est très facile à déterminer selon les pays et selon les circonstances, d’une part en examinant les nécessités de protection et de défense dans tel pays, d’autre part en ne perdant jamais de vue le principe général que nous avons posé.

Par exemple nous sommes en France et nous regardons, je suppose, les Etats-Unis d’Amérique. Pouvons-nous nous conduire d’après le principe américain ? Je réponds fermement : Oui. Pouvons-nous pousser l’application de ce principe aussi loin que les Américains et être aussi libres que les Américains et ne pas faire à l’Etat plus de sacrifices que les Américains n’en font ? Je réponds fermement : Non.

Les Américains n’ont pas de voisins ou n’ont que des voisins très faibles. Ils peuvent faire à l’Etat beaucoup moins de sacrifices que nous. Les nécessités d’ordre intérieur sont les mêmes, les nécessités de défense extérieure sont toutes différentes. Si les Américains du Nord étaient divisés en deux peuples, chacun de ces deux peuples serait précisément dans la même situation que nous et chacun de ces deux peuples serait forcé par les nécessités de la défense de faire à l’Etat plus de sacrifices et