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au nom de l’unité morale du pays et d’un patriotisme à la mode de 1630 ; mais aujourd’hui il ne peut y avoir de patriotisme que dans le libéralisme.

L’esprit despotique moderne consiste à gouverner pour un parti, pour un groupe de passions ou d’intérêts, pour un syndicat, et à lui sacrifier l’intérêt général du pays que l’on gouverne ; il est donc, comme forcément, le contraire même du patriotisme. L’esprit libéral, qui semble ne s’inquiéter que de l’individu, par ceci d’abord qu’il se met en dehors des partis et des syndicats, est sinon au-dessous d’eux, du moins aussi loin d’eux que possible, et qu’ils lui sont profondément indifférents ; par ceci ensuite qu’il rêve d’un État où chaque homme serait plus libre que dans tout autre État de l’univers, et par conséquent se trouverait bien dans cet État, et par conséquent l’aimerait d’une profonde reconnaissance et d’un profond amour ; reconstitue dans la liberté le dévouement que le citoyen ou le sujet ancien avait pour son État dans le despotisme ; — et ainsi il est patriote de la seule façon dont on doit l’être et dont on peut l’être dans les temps modernes, et en dernière analyse il est le patriotisme lui-même.

Je ne sais pas si je suis patriote parce que je suis libéral, ou si je suis libéral parce que je suis patriote. Je suis libéral certainement par amour de moi, pour avoir dans mon pays, quand j’ai donné